Le système de retraite suédois par points, vanté par Emmanuel Macron, est-il viable ?

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Le système de retraite suédois par points, vanté par Emmanuel Macron, est-il viable ?
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Pendant sa campagne présidentielle, le candidat Macron a souvent cité le modèle de régime par points à la Suédoise dans lequel il suggérait de puiser des idées. Mais le système fonctionne-t-il réellement ? Non, si l’on en croit Philippe Martinez, secrétaire général de la CGT qui affirme au micro de France Inter, jeudi 3 octobre 2019 : « Il y a un pays où il y a un système de retraites à point, la Suède. En France, 7,5 % des personnes de plus de 65 ans vivent sous le seuil de pauvreté. En Suède […] c’est 15 %, le double. »

Pourquoi la Suède a modifié son système de retraite ?

Dans les années 1992-1994, la Suède a mené une réforme radicale de son système de retraite pour aboutir, après 10 ans de concertation, a un système de retraite « à points » entérinant l’ancien régime.

Selon l’ouvrage, La Réforme du système de retraite suédois. Premiers résultats d’Ole Settergren, chef du service des statistiques à l'Office suédois des pensions, « ce sont essentiellement les déficits actuels et futurs qui ont motivé la réforme suédoise ».

La Suède dispose en effet d’un fonds substantiel de réserve (buffer fund) permettant de maintenir la stabilité du système de retraite, mais des projections ont montré qu’en tenant compte de l’augmentation de l’espérance de vie et de la réduction du nombre d’actifs, le fonds de réserve aurait été épuisé d’ici 2015-2020.

La Suède aurait pu choisir d’augmenter le taux de cotisation retraite des travailleurs pour maintenir la viabilité de son système de retraite. Toutefois, celui-ci étant corrélé au taux de croissance économique, le gouvernement suédois a estimé qu’une croissance faible nécessiterait d’augmenter le taux de cotisation de 18 % à 25 % voire 30 % de la totalité des salaires. « Une telle augmentation a été considérée comme politiquement et économiquement infaisable » explique Ole Settergren.

Valeur des points et taux de remplacement

Un premier point de crispation des opposants au régime universel pas points : la fluctuation de la valeur des points selon la conjoncture économique. En Suède afin d’éviter à tout prix un déficit budgétaire, lorsque les recettes du régime de retraite sont trop faibles, un mécanisme d’équilibrage a été mis en place.

Ainsi la valeur du point a été réévalué à la baisse à trois reprises (2010, 2011 et 2014), entraînant une baisse automatique du montant des pensions. À noter que le régime universel français prévoit une règle d’or en ce qui concerne la valeur du point : il ne pourra pas baisser.

Par ailleurs, le taux de remplacement a lui aussi baissé pour passer de 60 % du salaire en fin de carrière en 2000 à 53,4 % en 2018 selon les chiffres de l’OCDE. À titre de comparaison, il est de 73,6 % en France en 2018.

Les retraités suédois sont plus pauvres que les retraités Français

Selon les chiffres de l’INSEE, en France, le taux de pauvreté est de 7,5 % dans la tranche d’âge 65-74 ans et de 7,9 % pour les plus de 75 ans. Il est le plus faible de toutes les tranches d’âges de la population française. Ces chiffres sont confirmés par le dernier panorama des pensions 2019 de l’OCDE selon lequel le taux de pauvreté relative des plus de 65 ans est, en moyenne, légèrement supérieur à celui de la population globale dans les pays de l’OCDE (13,5 % contre 11,8 %), alors qu’en France, il est inférieur de 4 %.

Or, selon Eurostat, 16,1 % des Suédois de 65 ans et plus sont menacés par la pauvreté, contre 9,5 % des seniors français, malgré un minimum vieillesse, malgré l’existence d’un minimum vieillesse de 8 254 couronnes pour une personne célibataire, soit 789,86 €, et 7 363 couronnes pour une personne mariée, soit 704,59 € (données 2019 du CLEISS).

Le système suédois augmente-t-il les inégalités ?

Pour les opposants au régime par points suédois, ce système contribue à augmenter les inégalités, car il ne fait pas de distinction entre les différentes situations professionnelles. Si l’on en croit le document de travail de Dominique Acker, Inspectrice générale honoraire des affaires sociale, 20 ans après la réforme, les retraites suédoises sont-elles toujours un modèle, le système permet la solvabilité à long terme du régime, mais il augmente les inégalités liées à l’éducation et au marché du travail, notamment en ce qui concerne les femmes et les travailleurs non qualifiés. Les Suédoises, dont les carrières sont en général moins linéaires et les salaires plus faibles que les hommes, reçoivent en moyenne seulement 68 % du montant des retraites des hommes.

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