MaPrimeRénov’ bientôt suspendue : l'exécutif promet une reprise avant la fin 2025
Face aux inquiétudes autour du gel du dispositif MaPrimeRénov’, le gouvernement a confirmé qu’une interruption temporaire était bel et bien envisagée. Le ministre de l’Économie, Éric Lombard, assure toutefois qu’il s’agirait d’un ajustement technique temporaire, destiné à désengorger les services et mieux encadrer les fraudes.
Arrêt partiel du dispositif : des contours qui restent flous
La rumeur d’une suspension prochaine s’est accélérée depuis le 3 juin, date à laquelle Le Parisien rapportait un possible gel des aides dès le mois de juillet, faute de crédits suffisants pour 2025. Le Ministère du Logement avait dans un premier temps botté en touche, évoquant une décision encore en réflexion. Mais l’audition d’Éric Lombard au Sénat, le 4 juin, a permis d’y voir plus clair : l’interruption est bien sur la table, même si le gouvernement entend la lever d’ici à la fin de l’année.
Saturation administrative, fraude ou manque de moyens ?
Toutefois, selon Éric Lombard, cette suspension temporaire n’est pas la conséquence d’une impasse budgétaire : sur les 3,6 milliards d’euros alloués pour 2025, moins de la moitié aurait été dépensés. Le ministre parle plutôt d’une gestion administrative sous pression, avec un volume de demandes devenu difficilement soutenable pour les équipes en charge du traitement. Autre facteur évoqué, la multiplication des soupçons de fraudes, avec environ 16 000 dossiers considérés comme « suspicieux », soit 12 % du total des demandes en cours.
Les sénateurs inquiets d’un effet domino
Les réponses du ministre n’ont pas semblé rassurer les sénateurs, qui se sont empressés de souligner les répercussions d’une telle suspension, même temporaire, sur la dynamique du secteur. Le sénateur PS Rémi Cardon craint en effet un « coup d’arrêt » brutal pour les artisans, bureaux d’études et industriels engagés dans la transition énergétique, qui pourrait casser la dynamique de l’économie déjà fragilisée de la rénovation thermique. De son côté, Yannick Jadot (EELV) a dénoncé l’instabilité chronique des dispositifs de soutien, dont la suspension serait « encore » justifiée par « le coup de la fraude » - rappelant par là-même la fin récente du dispositif Pinel et la réduction drastique du prêt à taux zéro.
Des modalités de suspension encore floue
S'agira-t-il alors d’un simple ralentissement ou d’un arrêt complet des dépôts ? Le flou reste entier quant aux modalités de la suspension, mais le ministre de l’économie promet que « le budget serait engagé et qu’il resterait en place ».
À ce stade, il est probable que seules les nouvelles demandes soient gelées, et que les aides déjà validées soient maintenues. En parallèle, le gouvernement prépare une réforme du dispositif : une proposition de loi portée par le député Thomas Cazenave, devrait prochainement être présentée pour muscler les dispositifs antifraudes et fluidifier les délais de traitement.
Un dispositif victime de son succès ?
Lancée en 2020, MaPrimeRénov’ a permis d’accompagner 2,5 millions de rénovations pour un volume estimé à 37 milliards d’euros de travaux, selon les derniers chiffres disponibles (bilan 2024). Son succès en a fait un pilier de la stratégie de décarbonation du logement, mais cette montée en puissance semble aujourd’hui se heurter aux capacités actuelles des institutions comme l’Anah, Agence nationale de l’habitat.
D’ici fin juin, Matignon, Bercy et le ministère du Logement devront trancher sur les ajustements à apporter au dispositif. En jeu, une éventuelle refonte avant la fin de l’année, dans un contexte budgétaire toujours sous tension.