Nouveaux fonds, contribution des hauts revenus… Comment Bercy envisage d’utiliser votre argent pour financer l’effort de guerre
Alors que l’Union européenne a annoncé un plan de 800 millions d’euros pour retrouver une souveraineté militaire, les États membres doivent désormais trouver les ressources nécessaires pour contribuer à cette cagnotte commune.
Parmi les pistes envisagées : une contribution supplémentaire des hauts revenus via l’impôt et la création de nouveaux fonds spécialisés.
Une contribution plus forte des hauts revenus
Invité hier sur France Info, le ministre de l’Économie, Éric Lombard, a clairement indiqué que l’épargne des Français serait mobilisée pour financer les dépenses de défense que la France souhaite mettre en place :
« Nous devrons faire plus d’efforts pour nous protéger, pour bâtir cette économie en faveur de la paix et renforcer la défense dans un modèle européen. Nous allons devoir dépenser plus d’argent public et donc, effectivement, cela imposera plus d’efforts », a-t-il souligné.
La première mesure envisagée consiste à pérenniser la contribution différentielle pour les ménages à hauts revenus, disposition votée dans le projet de loi de finances 2025. « Les personnes qui ont une épargne importante doivent contribuer, et c’est ce à quoi nous réfléchissons », a indiqué le ministre.
Pour rappel, la contribution différentielle applicable aux hauts revenus (CDHR) vise à garantir une imposition minimale de 20 % sur les revenus les plus élevés. Elle concerne les contribuables dont le revenu fiscal de référence dépasse 250 000 euros pour une personne seule et 500 000 euros pour un couple.
Fonds liés à la défense et protection des entreprises ?
Qu’en est-il des entreprises, souvent en première ligne lorsqu’il s’agit de renflouer les caisses de l’État ? Éric Lombard a tenu à se montrer rassurant, soulignant qu’elles « participent déjà à une surtaxe qui rapportera 8 milliards d’euros cette année ».
Une autre piste explorée serait la création de nouveaux fonds spécialisés dans la défense. Ceux-ci pourraient être proposés aux épargnants sous forme de supports d’investissement au sein des contrats d’assurance-vie et Plan d’Épargne Retraite (PER).
À terme, on pourrait donc assister à une segmentation encore plus marquée entre les investisseurs privilégiant les critères ESG et ceux qui cherchent à profiter du dynamisme retrouvé du secteur de la défense.
À NOTER
Actuellement, plusieurs ETF (trackers) en Bourse permettent d’investir dans des entreprises du secteur de la défense. Ces valeurs connaissent depuis plusieurs mois une hausse marquée, avec des valorisations historiquement élevées pour des groupes comme Dassault, Safran ou encore Thales.
Faire « appel à la Nation »
Le président Emmanuel Macron avait déjà laissé entendre, lors d’un échange avec des internautes le 20 février dernier, qu’il n’excluait pas de « faire appel à la Nation » pour financer l’effort de guerre et aider l’Ukraine. Ses pistes de réflexion évoquaient même le lancement de nouveaux produits d’épargne dédiés au financement de certains programmes de défense, sans entrer davantage dans les détails.
Ces produits s’inspireraient néanmoins du modèle du Livret A, dont les encours colossaux représentent une manne financière idéale pour soutenir l’effort de défense. Cependant, le Conseil constitutionnel a déjà rejeté à deux reprises des propositions visant à flécher une partie des fonds du Livret A, du LDDS ou du LEP vers l’industrie de la défense.
Une proposition également rejetée par l’ancien ministre de l’Économie, Bruno Le Maire, qui s’était opposé à cette idée en novembre 2023 : « le Livret A, pour moi, c'est le logement social et ça doit le rester », avait-il estimé à l’époque.
Enfin, la création d’un « Livret d’épargne Défense & Souveraineté », proposée par le Sénat en 2024, n’a par la suite pas obtenu l’aval des députés. L’annonce du nouveau plan de 800 millions d’euros pour la défense, présenté par Bruxelles, rebat cependant les cartes et pourrait amener députés et sénateurs à reconsidérer leurs positions.
