Épargne retraite : 250 000 victimes du CREF sont susceptibles d’obtenir une réparation de l'État

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Non la partie n’est pas terminée. 16 ans après ce que les observateurs nomment le « scandale du Complément de retraite des fonctionnaires - CREF », les victimes de l’ex-régime de retraite (essentiellement de l’Éducation nationale) continuent de réclamer des comptes.

Selon le CIDS (Comité d’information et de défense des 450 000 adhérents et anciens adhérents du CREF et du COREM), des dizaines de milliers de personnes sont susceptibles aujourd’hui de demander réparation à l’Etat reconnu fautif de ne pas avoir pas exercé son contrôle à temps et de manière régulière sur les conditions de fonctionnement du régime CREF et de sa mutuelle gestionnaire, la Mutuelle Retraite de la Fonction Publique (MRFP). 

La responsabilité de l’État reconnue

Pour mémoire, le Complément de retraite des fonctionnaires (CREF) a mis la clé sous la porte en 2001 (lire encadré ci-dessous) après avoir décidé, lors de son assemblée générale du 30 octobre 2000, une baisse, au début de l’année 2001, de 16,7 % des avantages des adhérents au régime. Appuyé par le CIDS, de nombreux adhérents ont engagé des recours en indemnisation devant les juridictions civiles et administratives et ont obtenu gain de cause.

Sur le plan administratif, « la faute lourde de l’Etat pour absence de contrôle du régime CREF a été reconnue par les arrêts du 14 juin 2010 de la Cour administrative d’appel de Paris. Ces arrêts ont même fixé le taux d’indemnisation des victimes du CREF à 20 % du préjudice subi. Ce dernier évolue dans la grande majorité des cas entre 5 000 et 15 à 20 000 euros », précise Maître Gaël Déchelette, avocat défenseurs des adhérents du CREF. 

Le CIDS indique que l’exécution de ces arrêts de 2010 ont permis l’indemnisation de plus de 2 000 personnes pour un montant total de près de 3 millions d’euros.  Les procédures engagées concernaient alors les 2 premières vagues de dossiers déposés par l’association.

Ces arrêts de 2010 ont été par la suite confirmés par le Conseil d’Etat dans sa décision rendue le 23 mars 2011.

Le point sur les procédures intentées contre l’État devant le Juge Administratif

Plusieurs vagues de réclamations émanant du CIDS ont suivi avec pour résultat le jugement du Tribunal administratif de Paris rendu le 14 mai 2013 et correspondant à la 3ème vague de dossiers déposés.
« Ce jugement a confirmé les arrêts de la Cour Administrative d’Appel de Paris de juin 2010 en ce qui concerne la faute de l’Etat et les règles d’évaluation du préjudice », note le CIDS. Ce dernier précise néanmoins que l’Etat a fait appel du jugement en espérant obtenir la reconnaissance de la prescription des demandes des requérants.
« Mais la décision attendue d’ici fin 2016 ou début 2017 confirmera que la prescription a été interrompue par les actions des premiers requérants. En effet, les victimes partagent une même situation juridique, celle d’avoir été adhérent du CREF lors de l’assemblée générale du 30 octobre 2000, et ont subi un même préjudice, celui de la baisse de leur complément retraite résultant des décisions de cette assemblée. La prescription de 4 ans des créances sur les personnes publiques est interrompue par chaque procédure engagée contre l’Etat et cette interruption joue pour toutes les victimes placées dans la même situation, même si elles ne se sont pas encore manifestées pour faire valoir leur droit à indemnisation », explique Maître Gaël Déchelette.

La 4°série de réclamations a été introduite devant le Tribunal Administratif le 1er décembre 2014. Elle concerne 1 300 allocataires. Un référé provision (pour un jugement plus rapide a été demandé pour une partie des requérants âgés de 80 ans ou plus. Cette procédure a permis l’indemnisation des requérants par l’ordonnance rendue le 22 décembre 2015 à hauteur de 20 % de leur préjudice, en cohérence avec les arrêts rendus précédemment.

Ce référé provision a été également demandé pour les allocataires les plus âgés dans la cinquième série déposée par le CIDS en juin 2016 (décision attendue au 1er semestre 2017).

Enfin, une sixième vague concernant près de 2000 requérants est en préparation pour fin 2016 ou début 2017.

90 % des victimes concernées peuvent faire valoir leur droit

Les demandes d’indemnisation ont été soumises par vagues successives de 1 500 à 2 000 requérants à partir de 2010. « Plus 10 000 d’entre-eux ont pu faire valoir leurs droits et être indemnisés à hauteur de 20 % de leur préjudice auquel s’ajoutent les intérêts moratoires, soit moins de 10 % des victimes concernées. Par conséquent, ce ne sont pas moins de 250 000 personnes touchées par la baisse de rendement du CREF, décidée le 30 octobre 2000, qui ignorent pouvoir agir devant le Tribunal Administratif avec la certitude d’obtenir gain de cause », souligne le CIDS.  

« Les procédures administratives susceptibles d’être engagées contre l’Etat concernent la majorité des allocataires et cotisants tout comme les démissionnaires du CREF ayant dû subir la baisse de la valeur de service du point décidée par l’assemblée générale de la MRFP le 30 octobre 2000 », avance Maître Gaël Déchelette. Chaque requérant doit être en mesure de produire un dossier complet, permettant d’établir son préjudice, par un expert-comptable auprès des Tribunaux.

Le CIDS rappelle par ailleurs que les sommes perçues par les victimes en réparation de leurs préjudices sont des dommages et intérêts et qu’à ce titre elles sont non imposables.

Tournée du CIDS en France

Le CIDS quant à lui annonce qu’il est à la disposition de toute personne concernée pour l’aider à cette fin. L’association organise une série de réunions publiques dans toute la France pour « informer les personnes concernées par la baisse du CREF décidée le 30 octobre 2000 qui n’ont pas encore fait valoir leurs droits et qui sont pour la plupart d’entre elles dans l’ignorance qu’elles peuvent encore obtenir réparation de leur préjudice. »

La première de ces réunions aura lieu vendredi 28 octobre 2016 à Carcassonne (11) de 14h00 à 17h00, Notre Dame de l’Abbaye, 103 rue Trivalle (l’entrée est libre). Pour cette première réunion publique, le CIDS cible tout particulièrement les personnes originaires de 14 départements :  Ariège, Hérault, Aveyron, Lozère, Pyrénées (65 et 66), Gard, Gers, Tarn, Tarn et Garonne, Aude, Haute Garonne, Lot et Lot et Garonne.

CREF : un feuilleton judiciaire ininterrompu depuis 2 000

La caisse complémentaire de retraite de la fonction publique (CREF), créée en 1949. Elle était gérée par la MFRP - l'Union La Mutuelle Retraite de la Fonction Publique. L’adhésion des membres se faisait à titre individuel et facultatif.

Sa particularité résidait dans son fonctionnement : 2/3 de sa gestion était géré en répartition et le tiers restant par capitalisation.

A la fin des années 1990, le système était arrivé à bout de souffle avec en prime une gestion calamiteuse des dirigeants. En 1999, le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales relève un déficit de provisionnement de 1,5 milliard d’euros. Le régime comptait à l’époque 400 000 adhérents environ.

Après avoir décidé la baisse de la baisse du rendement du régime en octobre 2010, l’assemblée générale a voté le 8 décembre 2001, la conversion du régime du CREF en un régime en points entièrement, géré à 100 % par capitalisation, le COREM. Une partie des adhérents rejoindra un régime fermé, dit le « R1 » Dans le cadre de l’opération, un droit d'option a été ouvert aux adhérents pour quitter le régime CREF moyennant une pénalité sur le montant de leurs cotisations versées (70 000 personnes ont choisi cette option). Le portefeuille de la MFRP a ensuite été transféré à une nouveau gestionnaire mutualiste : l’Union mutualiste de retraite (L’UMR).

Fin 2013, le régime R1 a amputé une nouvelle fois les rentes des allocataires de 30 %.

S'agissant du contentieux judiciaire cette fois, il convient de rappeler que la cour d'appel de Paris a, par un arrêt du 29 avril 2011, condamné la MRFP à indemniser plus de 4 400 anciens adhérents du CREF au titre de sa responsabilité contractuelle, à hauteur d'une somme globale de 5,5 millions d'euros.

Enfin, des condamnations pénales ont été prononcées contre plusieurs dirigeants du CREF.
Lire : deux anciens dirigeants du CREF-Corem condamnés par la Cour d’appel de Paris.

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