« Sell in May and go away » : que penser du célèbre adage boursier ?
Chaque année, à l’approche du mois de mai, le même refrain revient dans les salles de marché et chez certains investisseurs particuliers : « Sell in May and go away ». Traduction : « vendez vos actions en mai, et partez ». Une formule un brin provocatrice, mais qui repose sur une idée ancienne : les marchés boursiers seraient historiquement moins performants entre mai et octobre qu’entre novembre et avril. Mais qu’en est-il vraiment aujourd’hui ? Faut-il encore suivre cet adage ou le reléguer au rang des vieilles croyances boursières ? Eléments de réponse.
Une idée lointaine venue d’Angleterre
L’origine de cette maxime remonte à la Bourse de Londres. Elle dérive de l’expression complète : "Sell in May and go away, come back on St. Leger’s Day", en référence à une célèbre course hippique anglaise qui a lieu en septembre. À l’époque, les investisseurs fortunés vendaient leurs positions au printemps pour passer l’été à la campagne, avant de revenir aux affaires à l’automne.
Cette habitude saisonnière a donné naissance à une stratégie bien connue des amateurs de statistiques : éviter la période estivale pour ne pas subir la faiblesse, voire la mollesse, des marchés.
Les chiffres confirment-ils cette théorie ?
Plusieurs études se sont penchées sur le sujet pour vérifier si cette saisonnalité supposée se reflète vraiment dans les chiffres. Certaines données semblent effectivement aller dans ce sens. D’après Bank of America, la période de mai à octobre est celle qui affiche, en moyenne depuis 1928, les moins bons rendements sur le S&P 500 : une performance moyenne de 2,25 % et une médiane de 3,35 %. En comparaison, la période de novembre à avril atteint une performance moyenne de 5,09 % et une médiane de 4,74 %.
Chez Deutsche Bank, les stratégistes Maximilian Uleer et Carolin Raab ont, de leur côté, analysé le Stoxx Europe 600. Leur constat : un investisseur vendant ses titres fin mai chaque année pour les racheter fin septembre aurait dégagé une performance annualisée de 9,1 %, contre 7,4 % pour une stratégie passive de type « buy and hold », depuis 1987.
La différence existe donc, mais elle reste modeste, surtout si l’on tient compte des frais et du stress d’une gestion plus active.
Aussi efficace que de jouer à pile ou face ?
L’efficacité mérite par ailleurs d’être nuancée à la lumière des performances récentes des marchés. Sur les dix dernières années, la tactique consistant à vendre en mai pour revenir en septembre s’est révélée perdante dans 7 cas sur 10. Selon les analyses de la Deutsche Bank, la « saisonnalité des marchés d'actions est surestimée », et suivre le fameux adage ne donnerait pas de meilleurs résultats que de « tirer à pile ou face ».
Une stratégie risquée à l’ère de la volatilité
Au final, faut-il prendre au sérieux cet adage et adopter une posture de trader actif, ou privilégier une approche plus patiente, comme la stratégie dite du « buy and hold », qui consiste à conserver ses positions sur le long terme ? L’histoire boursière tend à montrer que, sur une longue période, les marchés ont généralement une trajectoire haussière.
Aujourd’hui, les facteurs qui influencent les marchés sont nombreux et n’obéissent plus fatalement à une logique saisonnière. Politique monétaire des banques centrales, publications de résultats, incertitudes géopolitiques ou encore pressions inflationnistes : autant d’éléments susceptibles d’engendrer de la volatilité à tout moment de l’année.
Plus encore, ce n’est pas le calendrier qui doit dicter votre comportement d’épargnant, mais bien votre profil d’investisseur, vos objectifs patrimoniaux et votre horizon de placement. Mieux vaut construire une allocation diversifiée, en adéquation avec vos projets, et s’y tenir avec rigueur, y compris durant les mois d’été. Cette période plus calme peut en revanche être propice à une révision de votre portefeuille, à un rééquilibrage, voire à des prises de bénéfices sur certaines lignes ayant fortement progressé.
Autrement dit, inutile de quitter précipitamment les marchés à l’arrivée des beaux jours. Une stratégie boursière pérenne repose avant tout sur une gestion adaptée, diversifiée et alignée avec vos objectifs de long terme. Une posture d’autant plus précieuse si vous souhaitez prendre du recul face aux fluctuations à court terme des marchés financiers. Le mois d’avril nous en a donné à ce titre un très bel exemple.
Cet article a une vocation strictement informative. Il ne saurait être considéré comme un conseil financier, juridique, fiscal ou en investissement émanant de Previssima.
