Vote historique : pour lutter contre les déserts médicaux, les députés adoptent la régulation de l'installation des médecins

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Vote historique : pour lutter contre les déserts médicaux, les députés adoptent la régulation de l'installation des médecins

Le 2 avril 2025, les députés ont adopté une mesure phare visant à mieux répartir les médecins sur le territoire. Cette disposition, intégrée dans une proposition de loi portée par Guillaume Garot (PS), impose une régulation de l’installation des médecins pour lutter contre les déserts médicaux.

Malgré une opposition du gouvernement et un rejet initial en commission, l’article clé du texte a été rétabli et adopté en séance avec une large majorité (155 voix pour, 85 contre). Le reste de la proposition de loi sera examiné en mai.

L’installation des médecins désormais encadrée

Jusqu’à présent, les médecins étaient libres de s’installer où ils le souhaitaient. Pour lutter contre les déserts médicaux, l’État et les collectivités locales essayaient d’attirer des médecins dans les zones en difficulté avec des incitations financières et professionnelles, telles que des :

  • Primes à l’installation;
  • Contrats attractifs (avantages fiscaux, prise en charge d’une partie du loyer ou du matériel) ;
  • Aides aux stages et accompagnement pour inciter les étudiants en médecine à découvrir ces territoires ;
  • La revalorisation des actes médicaux dans certaines zones pour rendre l’exercice plus rentable.

Ce qui changerait avec la régulation

Tout médecin libéral ou salarié devrait désormais obtenir une autorisation préalable de l’Agence Régionale de Santé (ARS) avant de s’installer dans une zone déjà bien dotée en médecins.

L’autorisation d’installation serait automatiquement accordée dans les deux cas suivants :

  • Si le médecin s’installe dans une zone sous-dotée, c'est-à-dire où l'accès aux soins est insuffisant ;
  • Si un médecin de la même spécialité quitte son activité dans la zone, permettant ainsi son remplacement.

Un débat houleux à l’Assemblée

La mesure a suscité de vives tensions à l’Assemblée :

Opposés au texte, certains députés (Renaissance, Droite Républicaine, RN) ont défendu le principe de liberté d’installation en s’opposant à toute régulation, prônant plutôt le maintien des aides financières.

Les partisans du texte, issus de divers groupes politiques (la proposition de loi étant transpartisane), ont au contraire mis en lumière le fait que les incitations financières ne suffisaient plus, et qu'il était nécessaire de réguler directement les installations : malgré les 86,9 millions d’euros d’aides versées chaque année par l’État, la situation ne s’améliore pas assez vite et les effets des réformes actuelles (comme la hausse du numerus clausus) ne seront visibles que dans dix ans.

Finalement, la majorité des députés ont voté la régulation, estimant qu'il s'agissait d'une réponse d’urgence à la pénurie de médecins dans les zones caractérisées par une offre insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins, définies selon l’article L1434-4 du Code de la santé publique.

Un nouvel outil pour cartographier les besoins : l’Itos

Pour accompagner cette réforme, un autre amendement prévoit la création de l'Indicateur de l'offre territoriale de soins (Itos). Cet outil serait actualisé chaque année par les différents ARS, pour permettre une évaluation plus fine de la répartition des médecins en fonction de plusieurs critères :

  • Le nombre de professionnels de santé présents dans chaque territoire ;
  • Le temps médical disponible par patient ;
  • La situation démographique et sanitaire locale ;
  • Les facteurs socio-économiques qui influencent l’accès aux soins.

Les objectifs de l’Itos

L’objectif de cet outil est double : identifier les "zones sous-dotées" de manière plus objective afin d’orienter les politiques de santé, et faciliter les décisions d’autorisation ou de refus d’installation des médecins dans certaines zones.

À noter :

Le gouvernement a tenté de modifier cet amendement en supprimant la prise en compte de la densité médicale par spécialité, mais cette proposition a été rejetée par les députés.

Quel est l’avenir de cette proposition de loi ?

Ce texte marque donc un tournant dans la gestion de l’accès aux soins en France, en passant d’une politique purement incitative à une politique de régulation plus contraignante.

Toutefois, le débat n’est pas terminé : le reste de la proposition de loi sera discuté en mai, le décret d’application devra préciser ses modalités exactes, et il faudra attendre les premiers résultats pour mesurer l’efficacité réelle de cette régulation face à la désertification médicale.

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